Doctrine Malikite

Au Nom de Dieu le Clément, Miséricordieux



Le Prophète (paix et salut sur lui) dit : « Chercher la science est une obligation pour chaque musulman ».

Il dit aussi : « les Anges étendent leurs ailes à celui qui cherche la science : par satisfaction de ce qu'il fait ».

Et il dit : «Certes, Allah, et Ses anges, les habitants des cieux et de la terre, jusqu'à la fourmi dans sa tanière et jusqu'au poisson prient pour celui qui enseigne aux gens le bien ».

Qu’Allah fasse de ce Forum une aumône courante pour Sa Face généreuse.

Que nos intentions soient purement pour Allah seul.

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Le statut et l'éthique du conseil en Islam sunnite

 Ashwaq
Samedi 29 Décembre 2007

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Question :

Quel est le statut et quelle est l’éthique du conseil et du Amr Bil Al-ma'arûf wa an-nahy 'ani al-munkar en Islam ?

Réponse :

1.Le statut :

Le Prophète (paix et bénédiction sur lui) dit : « La religion est fondée sur le conseil sincère ». Les Compagnons présents dirent : 'Pour qui, Ô Messager de Dieu ?'. Il dit : « Pour Dieu, pour Son Messager, pour Son Livre, pour les dirigeants des Musulmans et pour le commun des mortels. »[1]

Abou-Saïd Al-Khoudri (Radia Allâhou ‘anhou) a rapporté que l'Envoyé de Dieu (paix et salut sur lui) a dit: « Que quelqu'un d'entre vous ne se méprise pas lui-même. Comment Ô Envoyé de Dieu, dirent-ils, peut-on mépriser soi-même ? C'est, reprit-il, lorsque l'un de vous voit un acte répréhensible et ne le désapprouve pas comme Dieu l'a ordonné. Dieu, au Jour de la Résurrection, lui dira: Qu'est-ce qui t'a empêché de désapprouver telle et telle chose répréhensible ? J'avais peur des gens, répondra-t-il. C'est moi, dira Dieu, que tu devais craindre en vérité. »

Allah dit dans le Coran :
« Ont été maudits par la bouche de David et de Jésus fils de Marie ceux des fils d’Israël qui ont renié et ce pour leur désobéissance (à Dieu) et pour leurs agressions répétées.
Quand ils faisaient quelque chose d’unanimement réprouvé, ils ne se l’interdisaient (proscrivaient) pas les uns aux autres.
Quelle bien mauvaise chose ce qu’ils faisaient !
»[2]

Les savants se sont basés sur le verset qui suit pour déterminer le statut juridique du « Amr Bil-ma'arûf wa an-nahy 'ani al-munkar » (qu'on traduit par: ordonner le bien et proscrire le mal):
« Qu'à partir de vous il se forme une nation appelant au bien, ordonnant les bons usages et en proscrivant les mauvais ! Ceux-là sont les récolteurs du succès »[3]
A partir de ce verset les savants sunnites ont dit:
Ordonner le bien et proscrire le mal est une obligation solidaire «Fard Kifâya» c'est-à-dire si une partie de la communauté le fait (les savants et ceux qui en ont les compétences et les conditions), les autres seront exonérés ; mais si personne ne le fait toute la communauté s'exposera au châtiment divin.

Ordonner le bien peut être une obligation ou une recommandation (mandûb) selon le sujet (les cas).
Par contre : proscrire le mal est obligatoire dans tous les cas : car tout ce que Dieu a interdit est à proscrire.
Ibn ‘Atiyya a dit : « L’unanimité (ijmâ’) des savants s’est établie sur le fait que proscrire le mal est obligatoire pour tous ceux qui peuvent et qui ne craignent pas (un mal) pour eux ou pour les musulmans. S’il y a crainte là il suffit de désapprouver le mal en son for intérieur (son cœur) et de ne pas fréquenter ceux qui le font. » [4]

Les ulémas préconisent que même ceux qui sont dans la désobéissance doivent se proscrire (s’interdire : an-nahy) le mal entre eux.
Le prophète (paix et salut sur lui) a dit :
« Ordonnez le bien même si vous ne le pratiquez pas en entier et proscrivez le mal même si vous ne l'évitez pas en entier »[5]

Il y a trois niveaux du « Amr Bil-ma'arûf wa an-nahy 'ani al-munkar » :

Dans l'explication du Hadîth suivant: « celui qui voit un mal qu'il le redresse par sa main, s'il ne peut pas qu'il le redresse par sa langue, s'il ne peut pas qu'il le redresse par son coeur... »[6]
l'Imâm An-nawawî nous dit que le premier niveau (redresser le mal avec la main) concerne (exclusivement) l'autorité centrale (le Sultan, la police...), le deuxième niveau concerne les savants (et ceux qui ont la connaissance et la compétence et qui connaissent les convenances du bon conseil); et le dernier niveau concerne tout le monde: (désapprouver le mal en son for intérieur est en effet possible pour le commun: et c'est le minimum imposé par la foi.)

2. L’éthique :

Il y a des manières et des conditions requises pour accomplir le conseil et l’appel à Dieu :

Dieu Tout-Puissant dit : « Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c'est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s'égare de Son sentier et c'est Lui qui connaît le mieux ceux qui sont bien guidés. »[7]

Le conseil a ses convenances: il doit être fait avec sagesse, respect et loin de toute violence. Le Prophète (paix et salut sur lui) nous informe dans le Hadîth authentique que Dieu donne avec l'indulgence et la douceur (ar-rifq) ce qu'il n'octroie pas par la violence.
La violence engendre la violence, l'anarchie et le désordre.

Voici deux excellents exemples à propos de l’éthique du conseil:
*Un jour, alors que le prophète était assis avec ses compagnons dans la mosquée, un bédouin rentra et se mit à uriner quelque part, au sein de cette mosquée; quelques gens se précipitèrent alors sur lui pour l'empêcher (dans une autre version : Les fidèles l'appréhendèrent à l'envi), mais le Prophète (Que la paix et le salut soient sur lui) s'écria: 'Laissez-le faire, ne l'interrompez pas, versez ensuite un sceau d'eau --- ou une jatte d'eau --- sur cette urine. Vous n'avez d'autre mission que de rendre toute chose facile et non de rendre les choses pénibles.'
Quand l'homme eût fini d'uriner, le Prophète donna l'ordre d'apporter une jatte d'eau et la répandit lui-même sur l'endroit souillé.
Dans une autre version : le prophète (Que la paix et salut soient sur lui), le convoqua et lui dit : Les urines et autres souillures n'en conviennent guère aux mosquées, celles-ci sont plutôt faites pour l'invocation d'Allah, les prières et la récitation du Coran.
Puis il se retourna à ses compagnons et leur dit : 'Allah ne vous a suscités que pour faciliter les obligations et ne vous a jamais suscités pour les rendre difficiles» le Prophète ordonna par la suite un seau d'eau et le versa sur l'endroit souillé.
Le bédouin, pris de stupeur de l'attitude du prophète (sur lui la paix), sa miséricorde et sa tolérance, dit alors : « Ô Allah, soit miséricordieux envers moi et Muhammad et éloigne les autres de ta miséricorde ! » Le prophète (sur lui la paix et le salut) réplique en souriant : Tu restreint là, quelque chose des plus vastes (la miséricorde d'Allah) ! »[8]

*Sidna Al-Hasan et Sidna Al-Huçayn -les deux fils de Sidna 'Ali (que Dieu l'agrée) gendre et cousin du prophète (sur lui la paix) et de Sayyidatunâ Fâtima fille du Prophète (paix et salut sur lui)-, virent un jour à la porte de la mosquée un vieillard qui faisait très mal ses ablutions et donnait ainsi le mauvais exemple aux passants et aux fidèles. Ils s'approchèrent alors de lui et avec une douceur et une politesse fines ils lui disent : « Ô monsieur, on souhaiterait que vous jugiez lequel de nous deux, mon frère ou moi, fait le mieux ses ablutions ? ». L'homme répondit oui, et aussitôt Sidna Al-Hasan et Sidna Al-Hoçayn commencèrent leur ablution. Ils le firent avec une telle perfection et une parfaite similitude que l'homme compris le message si délicatement passé. L’homme comprit leur allusion et apprit la manière correcte de faire les ablutions. Ceci prouve que dans des cas similaires, des allusions ou des conseils indirects sont bien plus efficaces afin d’éviter d’embarrasser autrui.

Le bon conseil doit se faire ainsi dans un esprit de sagesse et de morale constructive et instructive sans essayer de détruire l'autre, le blesser, ou le juger...

Le bon conseil avec la sagesse part d'une intention d'amour et d'altruisme envers le prochain.

Il convient de prodiguer ses conseils discrètement et non publiquement afin de ne pas embarrasser la personne.

Les conseils doivent être donnés d’une manière aimable et douce.

Celui qui prodigue le conseil doit expliquer à la personne ses erreurs et soutenir ses positions à l’aide de preuves tirées de la Législation islamique (Sharî`ah).

Il convient à celui qui reçoit le conseil d’écouter et de l’accepter.
« Ceux qui écoutent le discours et en suivent le meilleur. Ce sont ceux-là que Dieu a bien guidés et ce sont ceux-là les gens doués de cerveau. »[9]

Notez bien : les pires ennemis (invisibles) de l'homme sont : Satan et l'âme charnelle (nafs)...Il ne faut jamais oublier d'appliquer les conseils à soi même et de faire notre propre bilan et notre examen de conscience régulièrement...

Notes de bas de page:

[1]Rapporté par An-nawawî, rapporté par Muslim selon Tamîm Ad-dârî..

[2]Sourate 5, verset 79 : Ainsi il est établi d’une façon bien nette que les membres d’une communauté croyante doivent s’interdire les mauvaises actions, de même qu’ils doivent s’ordonner les uns aux autres de faire le bien. Le fait de manquer à ce devoir collectif a valu aux fils d’Israël d’être maudits de la bouche de leurs propres prophètes : David et Jésus.

[3]Sourate 3 ; verset 104.

[4]Voir le Tafsîr du verset 79 de la Sourate 5 (Tafsîr Al-qurtubî).

[5]Référence : Al-bahr Al-madîd fî tafsîr al-qurân al-majîd d'Ibn 'Ajîba : commentaire du verset 104 de la Sourate III voir aussi 'Tafsîr Al-qurtubî'.

[6]Hadîth 34 dans les 40 Hadîths rapportés par An-nawawî.

[7]Sourate 16 (les Abeilles), An-Nahl, verset 125.

[8]Voir : Al-Bukhârî : Livre des ablutions, CHAPITRE LVIII. --- Du fait de verser de l'eau sur l'urine dans la mosquée et Muslim dans le livre de la Purification, Hadîth : 427.

[9]Coran : Sourate 39, verset 18.

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