Dieu dit dans le Coran: « Ils n’ont pas apprécié Dieu à Sa juste valeur alors que la terre tout entière est dans Sa poignée, le jour de la résurrection, et que les cieux sont enroulés dans Sa main droite. Gloire et pureté à Lui qui est bien au-dessus des associés qu’ils Lui donnent ! »[1].
Al-kalabâdhî (m 380H) dans son Kitâb At-ta'arruf chapitre 5 et 6: dit
"Pour les savants de la Sunna, Dieu possède des Attributs réels et par lesquels Il est qualifié, tels que : Science, Puissance, Force, Gloire, Mansuétude, Sagesse, Grandeur, Pouvoir irrésistible, Éternité, Vie, Volonté normative (irâda ) et Volonté créatrice (mashî'a ). Ces Attributs ne sont ni des corps, ni des accidents, ni des substances, pas plus que Son Essence n'est un corps, ni un accident, ni une substance. Ces savants s'accordent également sur le fait que Dieu possède Ouïe et Vue, Face et Main (cf.Coran), mais qui ne sont pas comme l'ouïe, la vue, les faces et les mains (des créatures). Ce ne sont pour Dieu ni des membres, ni des organes, ni des éléments. Affirmer leur existence ne signifie pas qu'Il a besoin d'eux, et que c'est par eux qu'Il produit les choses; mais leur signification est à la fois la négation de leurs contraires et l'affirmation qu'ils existent en tant que tels et qu'ils subsistent en Lui. Mentionner la Science divine ne signifie pas seulement la négation en Lui de l'ignorance, et la Puissance divine la négation de l'impuissance, mais c'est bel et bien affirmer cette Science et cette Puissance. Si la négation de l'ignorance suffisait pour être qualifié de savant, et celle de l'impuissance pour être qualifié de puissant, n'importe quelle chose inanimée dont on nierait l'ignorance et l'impuissance serait alors savante et puissante ! Il en irait de même pour tous les attributs.
L'attribution que nous Lui faisons nous-mêmes de telles qualités n'est pas forcément un Attribut pour Lui, mais notre attribution est celle d'une qualité qui existe en nous et qui est la transposition d'un Attribut subsistant en Lui. Quiconque fait de sa propre attribution un Attribut de Dieu, sans que cet Attribut ait été réellement affirmé de Dieu, est véritablement un menteur, mentionnant pour Dieu quelque chose qui ne saurait réellement Le qualifier.
Dieu peut bien être mentionné par quelqu'un d'autre, car l'acte de mentionner est un attribut de celui qui mentionne et non de celui qui est mentionné, tandis que celui qui est qualifié ne l'est pas forcément par l'attribution de celui qui lui accorde des qualités. Ainsi donc, si l'attribution de celui qui Le qualifie suffisait pour être un Attribut de Dieu, les attributions que Lui donnent les polythéistes et les infidèles seraient pour Lui des Attributs réels, tels qu'avoir une épouse, un fils et des égaux !
Dieu a affirmé Lui-même Sa transcendance par rapport à leurs attributions par Sa parole : « Gloire à Lui et qu'Il soit exalté au-dessus de ce qu'ils Lui attribuent ! »[2].
Il est Un, Il a créé toutes choses et n'a besoin d'aucune de Ses créatures, Il n'a pas engendré et n'a pas été engendré.
Il a La Science ancienne et infinie ainsi que celle de l'invisible (ghayb): « Ils n'embrassent rien de Sa Science »[3], « Dieu a embrassé toute chose de Son savoir »[4], « Il l'a fait descendre par Sa Science »[5], « Nulle femelle ne porte ou ne met bas si ce n'est par Sa Science »[6],
Il est le Majestueux; le Puissant qui détient la Faveur immense : «C’est Lui Le Fort et Le Puissant »[7], « Celui qui détient la Faveur Immense »[8], « A Dieu appartient l'Omnipotence, en totalité »[9], « Celui qui détient la Majesté et la Munificence »[10].
Tous les attributs de perfection qui conviennent à la Magnificence d'Allah - Exalté soit-Il - Lui reviennent obligatoirement.
Il est impossible de Lui attribuer un quelconque défaut, cela ne convenant ni à Sa Magnificence ni à Sa Grandeur.
Il Lui est permis de faire ou de ne pas faire toute chose pouvant être (al-mumkinât) : comme le fait de donner l'existence (à celui qu'Il veut) et de faire mourir (celui qu'Il veut)."
Les savants sunnites divergent à propos des « allées » et « venues » et des « descentes » divines. La majorité pense que ce sont des Attributs de Dieu, selon le mode qui Lui convient, et dont on ne peut rien dire de plus que ce qu'on lit dans le Coran et ce que transmet la Tradition. Il faut y croire, et on ne doit pas en discuter. Selon Muhammad Ibn Mûsâ Wâsitî, Son Essence est inexplicable et il en va de même pour Ses Attributs, et ce qui montre bien le caractère impénétrable de Dieu, c'est que l'on désespère d'élucider la nature véritable des Attributs et les réalités profondes de l'Essence.
En revanche, on a donné l'interprétation allégorique suivante : « aller » à une chose signifierait pour Dieu lui faire parvenir ce qu'Il veut, « descendre » vers elle serait pour Lui s'occuper d'elle, en « être proche » ce serait l'honorer, en « être éloigné » serait la disgracier. Ce même procédé d'interprétation était appliqué pour tous les Attributs à caractère anthropomorphique (mutashâbiha ).
"Il n'y a rien qui Lui ressemble; et c'est Lui l'Audient, le Clairvoyant". Coran 42.11.
Il est important de rappeler enfin le procédé utilisé quand on rencontre un texte du Coran ou de la Sunna concernant les Attributs d’Allah qui semble impliquer une ressemblance entre le Créateur et la créature. Si un tel cas se présente, la voie la plus sûre est de remettre le sens d’un tel texte à Allah le Très Haut, car ces textes font partit des textes ambigus (mutashâbih). Cette attitude s’appelle at-Tafwîd, et c’est la voie suivie par les premiers musulmans et par un petit nombre de théologiens. On croit au texte comme il a été révélé sans essayer d’en comprendre le sens (Dieu a mis ainsi, notre foi à l’épreuve et il convient à l’être humain de reconnaître sa faiblesse et son ignorance en toute humilité face au miracle du Coran[11]). La seconde méthode est celle de la majorité des théologiens, et il s’agit, de chercher au verset un sens conforme à la langue arabe et qui respecte en même temps les convenances à l’égard de Dieu: une interprétation possible, et conforme à la fois aux figures de style de la langue arabe et à la Majesté et à la Transcendance Divine. On parlera alors de at-ta’wîl, c'est-à-dire « l’interprétation » avec ses convenances et ses règles concernant ces textes ambigus.
Dieu dit dans le Coran à propos des versets dits : mutashâbihât (ambigus) : « C’est Lui qui fit descendre sur toi le Livre dont certains versets sont bien explicités, ce sont l’Ecriture mère (muhkamâtun), et d’autres prêtent à confusion (mutashâbihâtun). Ceux qui ont en leur cœur une tendance à l’errance (dont les cœurs sont malades) suivent ce qui est équivoque en vue de la discorde et en vue de son interprétation. Or ne sait son interprétation que Dieu, et les gens bien enracinés dans la science disent : « Nous y avons cru. Tout vient de notre Seigneur ».Seuls se souviennent les gens doués de cerveau. »[12]
Ibn 'Ashir dit dans ses vers à propos des attributs:
Le Livre de la Mère des Articles de Foi et ce qu'elle Contient comme Principes
14 (les attributs suivants) sont nécessaires (il est obligatoire d’y croire) pour Allah : (1) l’Existence, (2) le fait d’ « être » sans début, | (3) de même que la Permanence dans l'Existence, (4) l'Indépendance absolue et qui englobe tout,
15 (5) être Différent de Sa création sans similitude, | (6) l’Unité dans Son Entité, Ses attributs, et Ses actions,
16 (7) la Puissance, (8) la Volonté, (9) la Connaissance, (10) la Vie, | (11) l’Ouïe, (12) la Parole, et (13) la Vue. Ce sont les (attributs d'Allah) nécessaires (obligatoires).
17 et les opposés de ces attributs sont impossibles (pour Allah) : | (1) la Non-existence, (2) avoir un commencement - ceux-ci sont seulement pour des choses créées,
18 (3) de même se fondre dans la non-existence et (4) être dans le besoin (d’une chose) sont également comptés, | (5) qu'Il ait un semblable, (6) la négation de Son Unité,
19 (7) l’incapacité (à effectuer des actions contingentes), (8) être forcé (à agir), (9) l’ignorance, (10) la mort, | (11), la surdité, (12) le mutisme, (13) la cécité et le silence.
20 il est possible (pour Allah) et dans Son droit d'accomplir des actions contingentes | - toutes - et aussi les laisser (ineffectuées) dans la non-existence.
21 Son existence a une preuve concluante : | Le besoin de tout ce qui est créé d’un Créateur.
22 Si l'univers avait commencé par lui-même | la similitude et la prépondérance se réuniraient (en même temps[13]).
24 Si le fait d’Être sans début n'était pas Son attribut nécessaire, | (le fait d’) avoir un commencement obligerait à une boucle infinie ou à une régression.
25 S’Il pouvait passer par la non-existence, Son attribut d’être sans début serait nié. | S'Il était semblable à la création, le fait qu’Il ait commencement aurait certainement été vraie.
26 Si l'indépendance n’était pas Son attribut nécessaire, il serait dans le besoin (d'un Formateur Lui-même). | S'Il n'avait pas été Un, Il n’aurait aucune capacité (à effectuer des actions, car s’Il avait un concurrent ou un adversaire ou un associé : ceci mettra l’équilibre voir l’existence de l’univers en péril).
27 S'Il n’était pas vivant, voulant, sachant, | et puissant, vous ne verriez pas un monde (empli de création merveilleuse).
28 La deuxième partie des six postulats si…alors ci-dessus est fausse. | Ainsi, (cela implique que) la première partie l’est également (fausse).
29 L’Ouï, la Vue, et la Parole | sont déduites par transmission (dans les sources premières) et conviennent également à Sa Perfection.
30 Si une chose contingente possible était impossible ou nécessaire, | elle obligerait à un changement des réalités (du monde physique).
Notes :
[1] Sourate 39, verset : 67.
[2] Sourate 6, verset : 100.
[3] Sourate 2, verset : 255.: extrait du verset du Kursiyy:
"Allah ! Point de divinité à part Lui, le Vivant, Celui qui subsiste par lui-même “al-Qayyum”. Ni somnolence ni sommeil ne Le saisissent. A lui appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Qui peut intercéder auprès de Lui sans Sa permission ? Il connaît leur passé et leur futur. Et, de Sa science, ils n'embrassent que ce qu'Il veut. Son Trône “Kursiy” déborde les cieux et la terre, dont la garde ne Lui coûte aucune peine. Et Il est le Très Haut, le Très Grand."
[4] Sourate 65, verset : 12.
[5] Sourate 4, verset : 166.
[6] Sourate 35, verset : 11.
[7] Sourate 42, extrait du verset : 19 : le verset complet est : « Dieu traite Ses Esclaves avec douceur et accorde Ses biens à qui Il veut. C’est Lui Le Fort et Le Puissant ».
[8] Sourate 58, verset : 29.
[9] Sourate 35, extrait du verset : 10 : d’autres auteurs traduisent ce verset comme suit : « Quiconque recherche la puissance et la considération, c’est à Dieu qu’appartient toute la puissance et toute la considération. A Lui monte le bon parler et la bonne action l’élève. Ceux qui ourdissent les mauvaises intrigues ont un supplice sévère et ce sont les intrigues de ces gens qui s’en vont en pure perte. »
[10] Sourate 55, extrait du verset 78.
[11] Ni l’intelligence ni la science ne pourront permettre à l’être humain d’élucider tous les mystères du Coran : d’où l’importance de la foi qui permet de comprendre que l’être humain avec ses facultés ou ses compétences reste faible et dépendant de la grâce de son Seigneur.
[12] Sourate 3, verset 7
[13]La métaphore ici fait référence à une balance ancienne à deux plateaux, qui à la fois pencherait d’un coté (ce qui représente l'existence) et en même temps serait équilibrée (signifiant la non-existence). L'idée ici est que quelqu'un doit bien placer un poids sur un des plateaux de la balance afin qu’il y ait prépondérance d’un des cotés. En d'autres termes, quelqu'un doit choisir l'état d'existence pour un phénomène physique particulier un moment particulier puisque ce phénomène physique ne pourrait pas choisir sa propre existence puisqu'il n'était pas présent avant qu'il ait été créé.